Suite « Un reproducteur se juge dans le Présent d’abord, puis dans le Passé et dans l’Avenir »

L’Avenir

Il apparaît immédiatement que la qualité d’un reproducteur découle de la qualité de sa descendance. D’où l’extrême importance de l’observation méthodologique et de l’étude circonstanciée de celle-ci pour un classement correct des animaux d’élevage.
Qu’exige-t-on actuellement des issues de sujets de reproduction ? La plus grande régularité possible dans l’expression des caractères morphologiques et dans l’accomplissement de leurs performances.

Que demande-t-on de plus aux reproducteurs ? Un rythme de production non moins régulier et d’une amplitude justifiant la rentabilité de leur exploitation. Ceci est vrai pour toutes les catégories d’élevage, qu’il s’agisse des cheptels de sélection ou des troupeaux commerciaux. Il y a lieu de bien faire ressortir l’importance de cette notion de régularité pour l’élevage de notre époque. Sa recherche pose, en fait, beaucoup plus de difficultés que l’obtention de sujets isolés aux performances record et souvent éphémères, ce qui ne peut surprendre, du fait de l’unicité biologique de chaque être vivant. L’éleveur n’a pas, certes, le pourvoir de supprimer la variabilité individuelle, mais son objectif est d’éviter de trop grands écarts dans sa production. Ainsi, un géniteur qualifié doit avoir accompli de nombreuses procréations régulièrement suivies pour un type d’accouplement fixé.

Le testage de jeunes sujets

Ce que désire, en outre l’éleveur, c’est de disposer constamment de la forte proportion des dits géniteurs qualifiés en service. Ce souhait légitime et économiquement impératif implique une détection ininterrompue de candidats à la reproduction susceptibles de remplacer honorablement les reproducteurs réformés.
La mise à l’épreuve ou TESTAGE, de jeunes sujets, qui consistent à les faire reproduire très tôt pour juger non moins tôt de leur capacité dans ce domaine, résulte de ce besoin continu d’animaux à potentiel génétique adapté aux exigences de l’élevage. Le testage est désormais, un mot très à la mode dont il convient de bien préciser la portée pratique, pour éviter qu’il n’apparaisse aux yeux des éleveurs comme une formule magique.

Disons tout de suite que cette mise à l’épreuve ne constitue, dans la carrière d’un reproducteur, qu’un examen liminaire permettant d’éliminer promptement des non-valeurs notoires, et de dégager les tendances héréditaires de certaines familles. C’est un débroussaillement qui, comme tel, assainit sa zone d’influence. En aucun cas, le testage n’a la prétention de consacrer définitivement la valeur d’un géniteur. Celle-ci ne s’affirme qu’au cours des ans et trop souvent hélas, quand l’animal a disparu.

Le testage n’est pas davantage une méthode de sélection, mais un moyen de vérification des effets de la sélection pratiquée. C’est assurément un excellent baromètre, non seulement pour une première estimation du sujet qui y est soumis, mais aussi pour mesurer la valeur du sélectionneur. Nous avons en effet constaté chez les bovins, à plusieurs reprises, que lorsque des distorsions se faisaient jour entre les résultats du testage et les autres formes d’appréciation d’un animal, elles avaient pour cause une ou plusieurs malfaçons dans le travail de sélection de l’éleveur.

Les modalités du testage

Voyons maintenant ses modalités d’application. Le testage est inconcevable s’il n’est accompagné du contrôle rigoureux de toutes les issues de cette opération. A ce propos, il n’est pas inutile de rappeler que le contrôle d’un animal n’a de sens que si ses résultats donnent lieu à une exploitation aisée et pleine d’intérêt pour l’éleveur. Il ne s’agit pas de contrôler à tout prix sans plan de travail préalablement établi.

Il ne s’agit pas non plus de s’enliser dans des détails. L’enregistrement de données essentielles et bien précisées auparavant reste seul compatible avec l’efficacité de l’intervention.

Il faut savoir aussi que la mention « testé » n’a de sens que quand elle est accompagnée de précisions sur le nombre de produits étudiés, le genre d’accouplements effectués, les conditions dans lesquelles cette épreuve a été réalisée. Il faut bien se persuader, là encore, qu’il est vain de porter un jugement sans point de comparaison.

Le testage doit être conduit périodiquement sur un nombre suffisant de jeunes, afin qu’après élimination, ceux retenus pour la reproduction puissent remplacer les adultes disparus. Il doit s’opérer dans un court délai afin de pouvoir concentrer les résultats et assez tôt, pour que la descendance, connue rapidement, permette d’utiliser à plein les services d’un géniteur de classe. Intensifier l’utilisation de ceux-ci doit devenir de plus en plus l’objectif majeur de tout programme de sélection !

Une organisation minutieuse

L’échantillon de descendants obtenus doit être suffisant, quantitativement parlant, pour apporter des éléments d’estimation aussi exacts que possible. Enfin le testage doit être effectué dans des conditions identiques à celles qui existeront quand l’animal sera en service.

Il est aisé de se rendre compte que pour mener à bien le testage et respecter sa ventilation indispensable dans le temps, il faut l’organiser minutieusement. Il s’agit, en effet, d’une opération assez lourde et coûteuse, qui ne peut être envisagée à titre individuel que par de grands élevages.

Pour les clapiers de faible ou moyen effectif, le testage ne peut être entrepris qu’en coopération entre collègues éleveurs se connaissant bien et collaborant étroitement entre eux. Nous revenons ici sur une vieille idée qui nous reste très chère, en nous demandant toujours quand les cuniculiculteurs en tireront parti !

Quand le futur reproducteur a subi victorieusement cette mise à l’épreuve, il doit affermir sa position dans ses fonctions de procréateur. Il existe différents niveaux de qualification pour les sujets favorablement testés, qu’ils acquièrent dans leur service d’adulte. Ceux-ci dépendent certes du potentiel héréditaire de l’animal, mais aussi de l’utilisation qui en fait par l’éleveur. Et ceci nous amène à parler des possibilités d’exploitation de la femelle et du mâle.

La FEMELLE est un élément de travail qui consacre la valeur d’un élevage.

N’hésitons pas à dire que c’est un capital dont dépendent en définitive les « revenus » de l’éleveur. Le choix des femelles, à la fois en tant que productrices et en tant que reproductrices est d’une extrême importance, car elles constituent le fonds du troupeau.

L’état civil et l’enregistrement de leurs performances doivent être tenus scrupuleusement à jour, pour permettre à l’éleveur d’étudier leur comportement, d’envisager des accouplements appropriés et de mettre en relief certaines lignées particulièrement intéressantes. Ainsi arrive-t-il souvent, dans les bons élevages qu’une femelle, ses filles et petites filles constituent une forte proportion des reproductrices utilisées. La bonne femelle n’est pas celle qui fournit les plus hautes performances, souvent non reproductibles, mais celle qui produit régulièrement et longtemps bien, et dont les descendants en font autant.

Ne pas confondre champion de beauté et géniteur champion.

Le choix du MÂLE est une opération d’autant plus délicate que son influence, si elle ne dépasse pas celle de la femelle au stade de l’accouplement, est par contre décuplée au niveau de l’élevage. Ce n’est donc pas sans raison qu’un mâle doit être sévèrement traité pour l’appréciation de sa descendance, et c’est bien pourquoi la pratique du testage s’opère à grande échelle pour les verrats et les taureaux. On ne dira jamais assez combien catastrophique peut être l’utilisation d’un mauvais mâle dans un élevage.

Cela arrive malheureusement assez fréquemment, du fait que plus encore que chez la femelle, l’éleveur reste fasciné devant l’allure ou la beauté de certains sires. Il oublie alors que cet animal n’est pas une fin en soi, mais un élément de travail, et que ses qualités apparentes ne sont pas forcément transmissibles aux lapereaux. Le lapin le mieux typé ne fournit pas obligatoirement les meilleurs lapereaux. L’éleveur doit se faire violence, et habituer son esprit à ne pas confondre champion de beauté et géniteur champion.
Celui-ci, connu et apprécié pour sa seule descendance, est généralement âgé ; il a subi favorablement l’épreuve du testage, et a gravi les échelons de la gloire progressivement. Il présente la sécurité des moyens éprouvés, et, comme tel, doit fonctionner jusqu’à la limite extrême de ses forces !

Au culte du champion de beauté, qui a fait les beaux jours jadis du taureau de foire, s’est ajouté, en cuniculture, un complexe d’idées »tabou », dont la fantaisie et la naïveté dépassent l’entendement et qui sont encore l’apanage de certains cuniculteurs. Il convient de les évoquer ici pour tenter de les démolir complètement. Pour satisfaire à un rite, dont nous cherchons en vain depuis des années les origines, il de bon ton, par exemple, d’acheter un nouveau mâle systématiquement tous les un ou deux ans. Peu importe si les mâles de l’élevage ont donné ou non satisfaction, s’ils sont ardents ou essoufflés. Il faut changer.

A suivre…